Le remaniement n’entrave pas les réformes
Publication du décret n° 2016-33 du 20 janvier 2016 fixant la liste des pièces justificatives des dépenses des collectivités territoriales, des établissements publics locaux et des établissements publics de santé.
Le décret n° 2016-33 du 20 janvier 2016 actualise les pièces nécessaires au mandatement de la dépense afin de permettre le paiement du cocontractant de l’administration. Après avoir dressé la liste des pièces communes, le décret fournit la liste des pièces par type de dépenses et notamment celles propres à la commande publique à la rubrique 4.
Publication de l’ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession et du décret n° 2016-86 du 1er février 2016 relatif aux contrats de concession.
L’ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession, transposant la directive n° 2014/23/UE du 26 février 2014 sur l’attribution des contrats de concessions, ainsi que le décret transposant la partie réglementaire de la directive sont parus au Journal Officiel respectivement du 30 janvier 2016 et du 2 février 2016. Surfant sur la vague de la transposition, tel le DUKE, le pouvoir réglementaire continue son travail de transposition et d’unification des règles de la commande publique.
Ce travail d’harmonisation et d’unification est assez flagrant :
- l’architecture des textes relatifs aux marchés publics et maintenant aux concessions est similaire,
- en outre, pour les concessions, l’ordonnance unifie les règles applicables aux différents contrats de concession au sens de la directive européenne tout en réaffirmant la spécificité des délégations de service public. Il est d’ailleurs à noter que la définition des délégations de service public n’a plus de sens que pour les collectivités locales.
Ainsi, l’ordonnance la définition de la concession est articulée autour de la notion de risque d’exploitation. La notion de service public n’a donc plus d’intérêt dans la définition de la détermination de la nature du contrat de concession, défini comme tout contrat « conclus par écrit, par lesquels une ou plusieurs autorités concédantes soumises à la présente ordonnance confient l’exécution de travaux ou la gestion d’un service à un ou plusieurs opérateurs économiques, à qui est transféré un risque lié à l’exploitation de l’ouvrage ou du service, en contrepartie soit du droit d’exploiter l’ouvrage ou le service qui fait l’objet du contrat, soit de ce droit assorti d’un prix. La part de risque transférée au concessionnaire implique une réelle exposition aux aléas du marché, de sorte que toute perte potentielle supportée par le concessionnaire ne doit pas être purement nominale ou négligeable. Le concessionnaire assume le risque d’exploitation lorsque, dans des conditions d’exploitation normales, il n’est pas assuré d’amortir les investissements ou les coûts qu’il a supportés, liés à l’exploitation de l’ouvrage ou du service » (article 5 de l’ordonnance).
Ces deux textes rentreront en vigueur le 1er avril 2016 à l’exception des articles 55 et 56 de l’ordonnance relatifs aux modifications des contrats de concessions et aux modalités d’indemnisation du concessionnaire en cas de résiliation ou de résolution du contrat par le juge.
Le DUKE vous le dirait, ce sera non pas l’année du singe mais l’année du poisson !
Publication du guide d’aide à la passation des procédures de passation dématérialisé.
Dans la perspective d’une généralisation obligatoire de la dématérialisation des procédures de passation, la DAJ a publié un guide pratique de la dématérialisation des marchés publics.
Le guide est composé de 11 fiches présentant la dématérialisation, le cadre juridique, la sécurisation, les supports de publicité, l’accès aux fichiers, la transmission et la réception des offres, leur examen, la conclusion du marché, et enfin, le contrôle et l’archivage.
Il prévoit des clauses types pour la rédaction des documents de marché par les acheteurs publics et la réponse à leurs questions.
Ce guide est voué à évoluer avec les contributions de chacun sans pour autant avoir de portée normative. Son intérêt est renouvelé, dans la perspective de l’objectif de dématérialisation totale des procédures de passation des contrats de commande publique à l’horizon d’octobre 2018.
Enfin, il convient de noter la parution de la synthèse de la consultation sur le projet de décret relatif aux marchés publics et notamment une volonté de clarification de certains articles et de pratiques issues de la réglementation actuelle tant dans la publicité que la liberté laissée aux pouvoir adjudicateurs soumis à l’ordonnance du 6 juin 2005.
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Le pouvoir adjudicateur n’est pas nécessairement responsable des fautes commises par son maitre d’œuvre – Conseil d’Etat, 6 janvier 2016, Société Eiffage Construction Alsace Franche-Comté, Société Campenon Bernard Franche-Comté, n° 383245.
Par une décision en date du 6 janvier 2016, le Conseil d’Etat est venu rappeler la responsabilité de chacun lors de l’exécution d’un marché public à prix forfaitaire et plus particulièrement, la responsabilité de la personne publique en cas de faute du maître d’œuvre ou d’un titulaire du marché en cause.
L’entreprise titulaire a droit à l’indemnisation de son préjudice issu des difficultés rencontrées lors de l’exécution du marché si ce dernier justifie soit que :
- les difficultés rencontrées trouvent leur origine dans des sujétions imprévues ayant eu pour effet de bouleverser l’économie du contrat ;
- ou, les difficultés rencontrées sont imputables à une faute de la personne publique commise notamment dans l’exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du marché, dans l’estimation de ses besoins, dans la conception même du marché ou dans sa mise en œuvre, en particulier dans le cas où plusieurs cocontractants participent à la réalisation de travaux publics.
Le Conseil d’Etat innove – reconnaissance de la responsabilité quasi-délictuelle du sous-traitant du titulaire d’un marché public – Conseil d’Etat, 7 décembre 2015, Commune de Bihorel, n° 380419.
Par une décision en date du 7 décembre 2015, le Conseil d’Etat est revenu sur une jurisprudence ancrée dans la pierre mais vraisemblablement pas dans les tablettes nouvelle génération.
Alors que la Cour administrative d’appel de Douai avait fait une application fidèle de l’impossibilité d’engager la responsabilité quasi-délictuelle d’un sous-traitant en rejetant pour irrecevabilité de telles conclusions, la Haute juridiction est revenue sur sa jurisprudence.
Jusqu’à cette décision, le principe était que « seules les personnes ayant passé avec le maitre d’ouvrage un contrat de louage d’ouvrage peuvent être condamnées envers le maitre de l’ouvrage à réparer les conséquences dommageables d’un vice de cet ouvrage imputable à sa conception ou son exécution » (Conseil d’Etat, 30 juin 1999, Commune de Voreppe, n° 163435).
Dorénavant, le Conseil d’Etat a reconnu au maitre d’ouvrage, la possibilité d’engager la responsabilité quasi-délictuelle d’un participant à une opération de construction avec lequel il n’a aucun lien contractuel mais qui serait intervenu sur le fondement d’un contrat conclu avec l’un des cocontractants de l’administration, tel un sous-traitant.
En revanche, seuls la violation des règles de l’art ou la méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires, à l’exception de toute violation ou non-respect des stipulations contractuelles ou de désordres apparus après la réception de l’ouvrage et qui ne sont pas de nature à compromettre la solidité de l’ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination (conditions d’engagement de la garantie décennale, Cour administrative d’appel de Bordeaux, 12 janvier 2016, n° 13BX01618).
En l’espèce, la collectivité n’était pas fondée à rechercher la responsabilité quasi-délictuelle de la société sous-traitante dans la mesure où « la commune se bornait à invoquer la méconnaissance du contrat conclu entre ce sous-traitant et l’entrepreneur ».