Actualité normative – spécial covid
Loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19
La loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 crée, dans le code de la santé publique, le régime de l’état d’urgence sanitaire, et déclare l’état d’urgence sanitaire pour une durée de deux mois à compter de la date de sa publication, soit le 24 mars 2020.
Elle habilite également le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance les mesures nécessaires à l’adaptation des dispositions législatives aux contraintes de la crise sanitaire.
Cet état d’urgence sanitaire a de nombreuses conséquences, parmi lesquelles une mesure de confinement de la population dont les effets sur les obligations ou les situations juridiques sont multiples.
A cet effet, le Gouvernement a édicté dans l’urgence un certain nombre d’ordonnances sur le fondement de l’article 38 de la Constitution afin de tenter de gérer cette situation inédite. Parmi ces ordonnances et concernant le secteur public, il est possible de relever notamment les suivantes :
- Ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l’ordre administratif ;
- Ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période, modifiée par l’ordonnance n° 2020-427 du 15 avril 2020 ;
- Ordonnance n° 2020-318 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles relatives à l’établissement, l’arrêté, l’audit, la revue, l’approbation et la publication des comptes et des autres documents et informations que les personnes morales et entités dépourvues de personnalité morale de droit privé sont tenues de déposer ou publier dans le contexte de l’épidémie de covid-19;
- Ordonnance n° 2020-319 du 25 mars 2020 portant diverses mesures d’adaptation des règles de passation, de procédure ou d’exécution des contrats soumis au code de la commande publique et des contrats publics qui n’en relèvent pas pendant la crise sanitaire née de l’épidémie de covid-19, commentée ci-dessous;
- Ordonnance n° 2020-326 du 25 mars 2020 relative à la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics ;
- Ordonnance n° 2020-330 du 25 mars 2020 relative aux mesures de continuité budgétaire, financière et fiscale des collectivités territoriales et des établissements publics locaux afin de faire face aux conséquences de l’épidémie de covid-19.
Ordonnance n° 2020-319 du 25 mars 2020 portant diverses mesures d’adaptation des règles de passation, de procédure ou d’exécution des contrats soumis au code de la commande publique et des contrats publics qui n’en relèvent pas pendant la crise sanitaire née de l’épidémie de covid-19
L’ordonnance n° 2020-319 du 25 mars 2020 portant diverses mesures d’adaptation des règles de passation, de procédure ou d’exécution des contrats soumis au code de la commande publique et des contrats publics qui n’en relèvent pas pendant la crise sanitaire née de l’épidémie de covid-19 adapte le droit de la commande publique à la situation sanitaire.
Prise sur le fondement de l’article 11 de la loi du 23 mars 2020, l’ordonnance adapte temporairement le régime des contrats publics au titre desquels les contrats de la commande publique, aux contraintes de l’état d’urgence sanitaire.
Champ d’application
L’article 1er de l’ordonnance fixe son champ d’application matériel et temporel, applicable :
- à l’ensemble des contrats régis par le code de la commande publique ;
- à l’ensemble des autres contrats publics, tels que, par exemple, les autorisations d’occupation temporaire du domaine public ;
- en cours d’exécution ou conclu pendant la période comprise entre le 12 mars et le 24 juillet 2020 (la période de l’état d’urgence sanitaire mentionnée à l’article 4 de la loi du 23 mars 2020 augmentée de deux mois) ;
- dans la mesure où ses dispositions sont nécessaires pour faire face aux conséquences de la propagation de l’épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation.
Aménagement des procédures de passation
Les articles 2 et 3 de l’ordonnance aménagent les procédures en cours en prolongeant les délais de réception des candidatures et des offres des entreprises et en modifiant les exigences du règlement de la consultation dont la mise en œuvre est rendue impossible par le confinement (visites de site, négociations en présentiel, signature électronique…).
Prolongation des contrats
L’article 4 autorise la prolongation des contrats arrivant à échéance entre le 12 mars et le 24 juillet 2020, même au-delà de la durée maximale, dès lors qu’une procédure de remise en concurrence ne peut être organisée du fait de l’épidémie.
Modification des conditions de versement d’une avance
Dérogeant de manière très significative au régime de l’exécution des contrats, l’article 5 permet la modification par avenant des conditions de versement des avances et autorise le versement d’avance supérieur à 60 % du montant du marché ou du bon de commande. Il supprime au passage l’obligation d’exiger une garantie à première demande.
Aménagement de l’exécution des contrats
L’article 6 permet l’aménagement des clauses contractuelles afin de soutenir les entreprises et permettre une réponse aux besoins urgents des personnes publiques. Ces aménagement s’imposent sauf clause contractuelle plus favorable au titulaire du contrat :
- Sur demande du titulaire, prolongation les délais d’exécution ;
- En cas de défaillance du titulaire, la personne publique peut recourir à un contrat de substitution auprès d’un tiers nonobstant toute clause d’exclusivité.
- En cas d’annulation de commande ou de résiliation du contrat, le titulaire est indemnisé des dépenses qu’il a engagées pour l’exécution des prestations ;
- En cas de suspension d’un marché à prix forfaitaire, l’autorité contractante poursuit le paiement des prestations selon les échéances et les montants prévus au contrat malgré l’absence de service fait ;
- En cas de suspension d’un contrat de concession, le versement des sommes dues au concédant par le concessionnaire est suspendu et le concessionnaire peut bénéficier d’une avance sur les sommes qui lui sont dues ;
- Lorsque les modifications d’un contrat de concession nécessaires à la poursuite de l’activité entraîne pour le concessionnaire une charge manifestement excessive au regard de sa situation financière, il est indemnisé du surcoût qui résulte de l’exécution, même partielle du service ou des travaux.
Ces dispositions dérogatoires viennent s’ajouter à celles déjà prévues dans le code de la commande publique et notamment, l’article R. 2122-1 du code de la commande publique. Pour rappel, l’article R. 2122-1 du code de la commande autorise la passation d’un contrat, en cas d’urgence impérieuse résultant de circonstances extérieures et imprévisibles, sans publicité ni mise en concurrence.
Doctrine administrative – Direction des affaires juridiques du Ministère de l’Économie et des Finances.
Commentaires et interprétation de l’ordonnance du 25 mars 2020
L’ordonnance est commentée :
- par une fiche technique de la Direction des affaires juridiques, téléchargeable sur son site internet (https://www.economie.gouv.fr/daj/conseil-acheteurs-fiches-techniques#champs-application). Cette fiche, outre qu’elle explicite les termes de l’ordonnance, rappelle les deux axes de l’ordonnance :
- assurer la continuité de la satisfaction des besoins des personnes publiques ;
- soutenir et protéger les entreprises face aux difficultés d’exécution.
- dans un jeu de questions-réponses, complétées au fil de l’eau, relatives aux conséquences de la crise sanitaire sur la commande publique et l’application en pratique de l’ordonnance. La fiche est complétée au fil de l’eau.
Fiche sur la passation et l’exécution des marchés publics en situation de crise sanitaire
Avant même la publication de l’ordonnance du 25 mars 2020 prise sur le fondement de la loi 2020-290 du 23 mars 2020 portant diverses mesures d’adaptation des règles de passation, de procédure ou d’exécution des contrats soumis au code de la commande publique et des contrats publics qui n’en relèvent pas pendant la crise sanitaire née de l’épidémie de covid-19, la direction des affaires juridiques du Ministère de l’Economie et des Finances a publié une fiche relative à la passation et l’exécution des marchés publics en situation de crise sanitaire.
Dans un premier temps, la fiche explique qu’eu égard au confinement, certaines entreprises seront dans l’incapacité d’assurer l’exécution du contrat. Or, ces difficultés pourraient relever du régime de la force majeure. La force majeure exonère les parties au contrat de toute faute contractuelle, ce qui exclut, dès lors, l’application de pénalité ou d’une quelconque autre sanction contractuelle.
La force majeure est constituée dès lors que l’événement était imprévisible et extérieur aux parties. Ces conditions sont remplies. La dernière condition réside dans l’impossibilité absolue pour le contractant (public ou privé) d’assurer ses missions. Cette dernière condition doit être appréciée cas par cas, elle sera parfois délicate à établir.
En tout état de cause, la Direction des affaires juridiques semble privilégier le recours à la force majeure plutôt que la détérioration des relations contractuelles.
Dans un second temps, la Direction des affaires juridiques rappelle aux acheteurs qu’ils ont la possibilité de mettre en œuvre des procédures de passation accélérées pour satisfaire leurs besoins urgents.
Les acheteurs bénéficient de plusieurs mécanismes, à savoir :
- la possibilité de faire exécuter le marché par une entreprise tierce en cas d’impossibilité pour le cocontractant ;
- l’application de délai réduit aux procédures de passation (R. 2161-8 3° du code de la commande publique) ;
- la mise en œuvre d’une procédure sans publicité ni mise en concurrence en cas d’urgence impérieuse. Le contrat devra alors être circonscrit aux besoins et à une durée strictement nécessaires (R. 2122-1 du code de la commande publique).
Cette fiche doit maintenant être lue à la lumière de l’ordonnance 2020-319 du 25 mars 2020.
Actualisation du guide du recensement économique des contrats de la commande publique – Version du 10 avril 2020 – Ministère de l’Économie et des Finances, Ministère de l’Action et des Comptes publics
L’observatoire économique de la commande publique a prorogé la date limite de déclaration des marchés publics sur l’application REAP au 30 juin 2020 pour les marchés notifiés en 2019 et au 31 mai 2021 pour les marchés notifiés en 2020.